Histoire des jeux vidéo

Magic Knight Rayearth (Super Famicom, 1995)

L’épopée féerique des chevalières magiques sur la 16 bits de Nintendo

Illustration

Chapitre I — L’univers CLAMP transposé vers l’âge d’or du RPG japonais

Lorsque Magic Knight Rayearth paraît sur Super Famicom le 22 septembre 1995, le collectif CLAMP est au sommet de sa gloire au Japon. L’anime triomphe sur les écrans, les mangas se vendent par millions, et l’univers de Céphiro fascine par son mélange unique de fantasy et de mélodrame adolescent.
C’est l’éditeur Tomy, alors surtout connu pour ses jouets, qui prend l’initiative de transposer cet univers sur la console 16 bits de Nintendo. Là où la version Game Gear proposait une aventure d’action-aventure rythmée, cette adaptation se veut plus traditionnelle : un RPG narratif au tour par tour, dans la droite lignée des grands classiques de l’époque comme Lunar, Final Fantasy IV ou Chrono Trigger.

Le scénario reprend fidèlement la trame de la première saison de l’anime : Hikaru, Umi et Fuu, trois collégiennes tokyoïtes, sont mystérieusement transportées dans le monde magique de Céphiro pour en devenir les chevalières légendaires, chargées de sauver la princesse Emeraude.
La fidélité à l’œuvre originale est manifeste : les dialogues reprennent le ton espiègle et sincère du manga, et les thèmes de l’amitié, du courage et du sacrifice y sont mis en avant avec justesse.


Chapitre II — Un système de jeu accessible mais solide

Magic Knight Rayearth version Super Famicom repose sur un système de combats au tour par tour classique, avec un accent marqué sur la complémentarité des trois héroïnes.
Chaque chevalière dispose d’un style distinct : Hikaru excelle dans les attaques physiques et la magie de feu, Umi maîtrise les sorts d’eau à zone d’effet, et Fuu combine magie de soutien et arc à distance. Cette distribution donne naissance à une belle dynamique d’équipe, même si le système reste globalement simplifié pour convenir à un jeune public.

Les déplacements sur la carte du monde rappellent ceux de Final Fantasy V, tandis que les donjons — relativement linéaires — intègrent de petites énigmes ou interrupteurs à activer.
Le jeu ne cherche pas à révolutionner le genre, mais il est efficace dans son exécution : interface claire, menus intuitifs, gestion des objets fluide.
Les combats, bien que lents, sont joliment animés et accompagnés d’effets visuels colorés qui renforcent l’identité magique du titre.


Chapitre III — Réalisation technique : la grâce et la retenue

Sur le plan visuel, Magic Knight Rayearth surprend par son élégance graphique.
Les sprites des héroïnes sont détaillés et expressifs, reprenant fidèlement les traits du style CLAMP. Les environnements — forêts, cités célestes, temples anciens — bénéficient d’une palette douce et pastel qui évoque davantage un dessin animé qu’un RPG traditionnel.
Les séquences narratives sont agrémentées de portraits animés et d’illustrations dessinées spécialement pour le jeu, apportant une touche émotionnelle bienvenue.

Musicalement, la bande-son composée par Yasunori Mitsuda (non crédité officiellement, mais reconnu pour son influence sur certaines pistes) et Yoshihiro Sakaguchi évoque les mélodies lyriques et aériennes de l’anime.
Les thèmes de combat sont entraînants, les mélodies de villages apaisantes et le thème principal d’Emeraude, au ton mélancolique, confère à l’ensemble une réelle cohérence émotionnelle.


Chapitre IV — Une adaptation sincère, pensée pour les fans

Ce Magic Knight Rayearth version Super Famicom n’avait pas la prétention de rivaliser avec les grandes productions de Square ou Enix.
Son objectif était avant tout de proposer une porte d’entrée accessible et fidèle à l’univers de CLAMP, pour un public jeune ou nostalgique de l’anime.
Et sur ce point, c’est une réussite.
Le rythme du jeu est bien dosé, la narration fluide, et la mise en scène soignée.
Certains passages manquent d’ambition — notamment dans la structure des donjons et la profondeur des combats —, mais l’ensemble respire la passion et la délicatesse.

Malheureusement, le titre n’a jamais quitté le Japon, limitant son rayonnement à un cercle de collectionneurs et de fans dévoués. Il s’agit pourtant d’un jeu représentatif du raffinement de la fin de l’ère Super Famicom, une période où les adaptations d’anime pouvaient encore surprendre par leur qualité et leur sincérité.


Verdict final

Critère Note /20 Commentaire
Graphismes 17/20 Superbes sprites, décors pastel, direction artistique élégante fidèle au style CLAMP.
Animation 14/20 Correcte mais peu dynamique, transitions parfois lentes.
Son 16/20 Belles compositions, ambiance mélodique et émotive.
Gameplay 15/20 Tour par tour classique mais équilibré et agréable.
Durée de vie 13/20 Aventure relativement courte (10–12 heures) mais sans longueurs.

Intérêt global

Magic Knight Rayearth sur Super Famicom est une adaptation à la fois humble et soignée, qui réussit à capturer la poésie visuelle et émotionnelle du manga original tout en proposant un RPG accessible et plaisant.
S’il n’égale pas la richesse des grandes sagas de Square, il se distingue par son atmosphère douce, son respect de la source et sa direction artistique d’une rare fidélité.
C’est une œuvre de cœur plus que de technique, un bijou de la fin d’une époque où la Super Famicom brillait encore de mille feux.
Un titre à (re)découvrir pour les amateurs d’univers féeriques et pour tous ceux qui mesurent la valeur d’un jeu à sa sincérité plutôt qu’à sa complexité.

🎮 Note finale : 15/20 — Un RPG enchanteur, fidèle et délicatement nostalgique.