Histoire des jeux vidéo

Première présentation de Halo par Steve Jobs

Une page méconnue de l'histoire du jeu vidéo

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Il existe des moments-clés dans l’histoire du jeu vidéo où tout semble basculer, non pas seulement pour une franchise, mais pour une industrie entière. L’un de ces instants s’est produit le 21 juillet 1999, lors de la Macworld Conference & Expo, quand Steve Jobs, alors PDG d’Apple, monta sur scène pour présenter un jeu mystérieux développé par un petit studio appelé Bungie. Ce jeu s’appelait Halo — et ce que peu de gens savent, c’est qu’il fut à l’origine conçu comme une exclusivité Macintosh.

Un contexte inattendu : Apple et le jeu vidéo

À la fin des années 1990, Apple cherchait à redorer son image auprès des joueurs. Les ordinateurs Mac étaient alors perçus comme des machines élégantes, mais peu adaptées au jeu vidéo. Steve Jobs, conscient du potentiel d’un tel marché, souhaitait démontrer que le Mac pouvait rivaliser avec le PC, y compris dans le domaine du divertissement numérique.
C’est dans ce contexte que Bungie, studio basé à Chicago, se présenta à Apple avec un projet ambitieux : un jeu d’action à la troisième personne, mêlant science-fiction, exploration planétaire et combats tactiques.

La présentation qui changea tout

Lors de cette conférence, Steve Jobs annonça d’abord fièrement que Bungie rejoignait la famille Apple en tant que développeur partenaire. Puis vint le moment fort : Jason Jones, cofondateur de Bungie, monta sur scène pour dévoiler les premières images de Halo.

Le public découvrit alors un vaste monde en 3D, baigné de lumière naturelle, avec des paysages montagneux et des véhicules blindés traversant des plaines verdoyantes. À l’époque, la démonstration était impressionnante : un environnement entièrement en 3D, des personnages animés de façon fluide, et un moteur physique dynamique.
Le jeu fut présenté comme une révolution à venir pour le jeu sur Mac : une expérience immersive de science-fiction militaire où l’on pouvait se déplacer librement dans un monde ouvert, affronter des ennemis intelligents et piloter différents véhicules.

Un projet Mac devenu fer de lance de Microsoft

Pour Apple et son public, Halo représentait la promesse d’un renouveau ludique. Mais ce rêve ne dura pas. Quelques mois seulement après cette présentation, Microsoft annonça le rachat de Bungie, bouleversant le destin du projet. Halo devint alors une exclusivité Xbox, rebaptisée Halo: Combat Evolved, et servit de titre phare au lancement de la première console de Microsoft en novembre 2001.

Ce basculement fut vécu comme une trahison par certains fans du Mac, mais il permit à Halo d’obtenir les moyens techniques et financiers nécessaires pour atteindre sa pleine ambition. Sous l’égide de Microsoft, le jeu abandonna sa forme initiale de jeu à la troisième personne pour devenir un FPS révolutionnaire, redéfinissant le genre sur console.

Une démonstration légendaire

Ce qu’il faut retenir de cette présentation, c’est la réaction du public : un mélange d’émerveillement et d’incrédulité. À une époque où les graphismes 3D étaient encore balbutiants sur ordinateur personnel, Halo se distinguait par son moteur fluide, ses vastes environnements et sa promesse d’une IA réaliste.
Steve Jobs, en véritable showman, mit en avant la puissance des Mac et leur capacité à accueillir des jeux de cette envergure. Il ne savait pas encore que ce jeu allait devenir le porte-étendard du principal concurrent de son entreprise historique : Microsoft.

Héritage et ironie du destin

Ironie de l’histoire : c’est sur une scène Apple que le futur symbole de la Xbox fut dévoilé pour la première fois. Halo est ainsi devenu un cas unique dans l’histoire du jeu vidéo : un projet né dans l’écosystème Mac, mais adopté et sublimé par Microsoft.
Sans la démonstration de 1999, Halo n’aurait sans doute jamais acquis cette aura mythique ni propulsé Bungie au rang de légende du développement.

Un tournant fondateur

La présentation de Halo par Steve Jobs ne fut pas seulement un moment curieux ou une anecdote technologique. Elle symbolise la manière dont une idée, née à la croisée de deux univers concurrents, a pu façonner l’avenir du jeu vidéo.
Elle rappelle aussi que, parfois, l’innovation naît du hasard et du croisement de destins industriels contradictoires.
En quelques minutes sur scène, Steve Jobs lança sans le savoir une révolution vidéoludique… qui allait profiter à Microsoft.