Histoire des jeux vidéo

Le MO5 Michel platini

Une pièce particulière

Illustration

Le Thomson MO5 Michel Platini : un micro-ordinateur français pas comme les autres

Au milieu des années 1980, la France vit une période fascinante de démocratisation de l’informatique. C’est dans ce contexte que Thomson, acteur majeur de l’électronique hexagonale, commercialise le MO5 Michel Platini, une édition très particulière du célèbre micro-ordinateur MO5, lancée dans le cadre du plan “Informatique pour tous”.
Sorti en 1985, ce modèle, au nom du footballeur alors au sommet de sa gloire, symbolise la rencontre inattendue entre technologie, éducation et culture populaire.

Un contexte historique singulier : entre école et salon

Pour comprendre l’origine du Thomson MO5 Michel Platini, il faut revenir à la politique technologique française du début des années 1980. Le gouvernement de l’époque, sous la présidence de François Mitterrand, lance un vaste programme d’équipement des écoles françaises en ordinateurs. Le but : former une génération de citoyens familiers avec l’informatique, à une époque où la micro-informatique se développe rapidement dans le monde.

Le Thomson MO5, commercialisé dès 1984, devient alors l’un des piliers de ce plan. Facile à produire en France, compatible avec un grand nombre de périphériques, et surtout conçu pour une utilisation pédagogique, il équipe des milliers de classes à travers le pays.
Mais Thomson cherche également à séduire le grand public et les foyers, un marché largement dominé à cette époque par les micros britanniques comme le ZX Spectrum, l’Amstrad CPC, ou encore le Commodore 64.

C’est dans cette optique que naît une idée marketing audacieuse : associer le MO5 à une star populaire capable de parler aux jeunes. Le choix se porte sur Michel Platini, capitaine de l’équipe de France de football et idole nationale après la victoire à l’Euro 1984.

Une édition spéciale pour démocratiser l’informatique

Le Thomson MO5 Michel Platini n’est pas une simple machine rebaptisée : c’est une édition limitée reconnaissable à sa couleur blanche (contrairement au modèle standard noir) et à la signature de Michel Platini apposée sur le capot.
La campagne de communication, très médiatisée, met en avant l’idée que même les enfants passionnés de football peuvent apprendre à programmer, jouer, ou découvrir l’univers fascinant de la micro-informatique grâce à ce micro-ordinateur.

Le slogan implicite : si Michel Platini soutient l’informatique, pourquoi pas toi ?
L’objectif de Thomson était clair : rendre l’ordinateur plus attrayant et moins intimidant pour le grand public.

Caractéristiques techniques du MO5 Michel Platini

Sur le plan technique, le MO5 Michel Platini reste identique au MO5 classique.
Voici ses principales caractéristiques :

Processeur : Motorola 6809E à 1 MHz

Mémoire vive (RAM) : 48 Ko

Mémoire morte (ROM) : 16 Ko

Graphismes : résolution maximale de 320x200 pixels, affichant 16 couleurs parmi une palette de 4096

Son : 1 canal sonore programmable

Clavier : 57 touches, dont des touches de fonctions et des caractères accentués (un avantage notable pour le français)

Connectiques : ports pour cassette, manettes, périphériques, et cartouches d’extension

Système d’exploitation : BASIC Microsoft intégré

Il pouvait se connecter à un téléviseur standard ou à un moniteur Thomson via la sortie vidéo, et chargeait les programmes principalement depuis des cassettes audio.

Une machine éducative mais aussi ludique

Bien que conçu à des fins pédagogiques, le MO5 Michel Platini proposait également un catalogue de jeux vidéo éducatifs et d’action, souvent développés par ou pour Thomson.
On y retrouvait des titres comme Théorie des jeux, Infographie, ou des jeux plus classiques tels que Le 5e Axe et Sapiens, deux productions françaises remarquables pour l’époque.

Certains programmes mettaient même en avant des mini-jeux liés au sport, surfant sur l’image de Michel Platini pour encourager l’apprentissage à travers le jeu.

Une icône d’une époque : le plan “Informatique pour tous”

Le MO5 Michel Platini représente un symbole fort du plan “Informatique pour tous”, lancé en 1985 et piloté par Laurent Fabius et Jean-Jacques Servan-Schreiber.
Grâce à ce plan, des milliers d’écoliers français découvrent l’informatique sur des MO5 ou des TO7, et apprennent les bases du langage Logo ou du Basic.
Le modèle “Michel Platini” a ainsi joué un rôle de vitrine populaire de cette révolution technologique française, rendant l’informatique accessible, sympathique et presque ludique.

Héritage et valeur historique

Aujourd’hui, le Thomson MO5 Michel Platini est devenu un objet de collection recherché.
Sa rareté — due au nombre limité d’exemplaires produits — et sa symbolique d’un âge d’or de la micro-informatique française en font une pièce emblématique.
Il incarne à la fois la naïveté et l’ambition d’une époque où la France rêvait d’indépendance technologique face aux géants américains et britanniques.

Sur le plan historique, ce micro-ordinateur témoigne aussi d’une tentative unique d’unir la culture populaire (le football) et la technologie éducative, une approche qui, bien que déroutante pour certains, a contribué à dédramatiser l’informatique auprès du grand public.

Le Thomson MO5 Michel Platini n’était pas seulement une édition spéciale d’un micro-ordinateur déjà culte : il symbolise une époque où l’informatique française voulait toucher le cœur du public en s’appuyant sur une figure universellement aimée.
À la croisée du sport, de l’éducation et de la technologie, cette machine incarne un moment d’histoire unique, celui d’une France optimiste, pédagogique et visionnaire, qui croyait encore que l’avenir numérique pouvait s’écrire en bleu-blanc-rouge — avec un ballon rond et un clavier.