Histoire des jeux vidéo

High School Kimengumi AKA "Le collège fou fou fou"

Pourquoi un retour en jeu vidéo 15 ans après

Illustration

Pourquoi High School ! Kimengumi: The Table Hockey a vu le jour quinze ans après la fin de la série
En décembre 2001, alors que le manga et l’animé High School ! Kimengumi (connu en France sous le titre Collège fou, fou, fou) avaient tiré leur révérence dès 1987, un nouveau jeu vidéo est pourtant apparu sur PlayStation : High School ! Kimengumi: The Table Hockey. Comment expliquer cette résurrection tardive, dans un contexte où la vague de popularité des années 1980 avait depuis longtemps disparu ? Revenons sur les raisons, les acteurs et la logique qui ont conduit à ce retour inattendu.

1. Le phénomène du « Simple Characters 2000 Series »
Au tournant du millénaire, D3 Publisher (un label de Bandai Namco) souhaitait enrichir sa ligne de jeux à bas prix, la Simple Characters 2000 Series. L’idée ? Proposer des titres à 2 000 yens (soit un peu plus de 15 € à l’époque) sous licence tirée de mangas ou d’animés cultes des années 1970‑80, mais adaptés en jeux légers, faciles à produire et destinés à un public de niche.

Chaque volume de la série portait un numéro — Vol. 05 devint le premier à exploiter Kimengumi — et s’appuyait sur un studio externe à petit budget (ici, le développeur Break) pour façonner un jeu court, rapide à réaliser, mais porteur d’une licence nostalgique. Avec ce format, D3 Publisher minimisait les risques financiers tout en titillant la fibre otaku, ravivée par les premières sorties DVD et les rediffusions TV des années 1990.

2. Une licence encore vivace chez Bandai Namco
Bien que le manga ne fût plus actif depuis quinze ans, la licenceKimengumi restait la propriété de Bandai, qui continuait de valoriser son catalogue patrimonial. Des rééditions de volumes reliés et des coffrets DVD avaient vu le jour à la fin des années 1990, maintenant un soupçon de notoriété : la marque n’était pas morte, elle était simplement passée sous le radar des plus jeunes.

En parallèle, la PlayStation dominait le marché et garantissait une base installée de millions d’unités. Pour Bandai, proposer un titre Kimengumi à petit prix, en fin d’année 2001, représentait l’opportunité de toucher à la fois des nostalgiques (désireux de rejouer à un univers de leur enfance) et des joueurs curieux de découvrir un jeu différent de l’énième clone de plate‑forme.

3. Le choix du hockey sur table : un gameplay simple, festif et décalé
Plutôt que de reprendre l’approche adventure/quiz des jeux Master System et MSX2, les décideurs ont opté pour un party‑game : le hockey sur table. Quelques raisons :

Accessibilité immédiate
Un seul bouton pour frapper le palet, un autre pour déclencher un « coup spécial » comique, et le tour est joué. Plus besoin d’apprendre des commandes complexes ou de déchiffrer des kanji : le gameplay est intuitif.

Multijoueur local
Jusqu’à quatre participants via Multitap, un argument de vente pour les fêtes et les sessions entre amis, plus accrocheur que les minis-jeux solos de la Master System.

Humour et exagération
Les fameux effets spéciaux – tremblements d’arène, invisibilité du palet, secousses sismiques – s’inscrivent parfaitement dans l’esprit loufoque du manga, sans nécessiter un budget de production élevé.

4. Les acteurs de la résurrection
Bandai Namco / D3 Publisher : porteur de la licence, éditeur et maître d’œuvre de la gamme Simple.

Break (développeur) : petit studio externalisé, habitué aux projets à budget restreint.

Motoei Shinzawa : l’auteur du manga, dont le nom et l’univers sous‑tendent toujours l’attrait nostalgique.

La collaboration s’est appuyée sur un contrat de licence simple, garantissant à Bandai un retour rapide sur investissement sans mobiliser de grosses ressources — un pari calculé, plus qu’un véritable « revival ».

5. Les attentes et la réception
À sa sortie, The Table Hockey n’a pas fait de vagues dans les charts japonais (les ventes en loose tournent autour de 30 000 exemplaires), mais il a trouvé son public :

Collectionneurs en quête de jeux exotiques PlayStation Japon.

Fans du manga désireux de prolonger l’expérience dans un format festif.

Amateurs de jeux bon marché prêts à tester une proposition atypique.

Critiques et joueurs saluent la fraîcheur et la simplicité du concept, tout en regrettant que le titre ne bénéficie pas d’une localisation ou d’un marketing plus ambitieux.

6. Héritage : un ultime coup de projecteur sur Kimengumi
Même s’il reste un objet de niche, High School! Kimengumi: The Table Hockey illustre parfaitement la logique économique et culturelle des licences japonaises à l’orée des années 2000 :

Exploitation patrimoniale à moindres frais.

Format “budget” pour diversifier l’offre PlayStation.

Nostalgie ciblée, surfant sur les premières vagues de DVD et de rediffusions.

Pour la franchise Kimengumi, c’est le dernier jeu en date : un adieu décalé et sportif à une bande de collégiens farfelus, quinze ans après leur dernier gag animée. Et, qui sait, peut‑être le début d’une nouvelle ère de redécouvertes rétro pour ce club d’empo­tés…